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Droits TV : Une guerre de huit milliards d'euros par année à partir de 2021

Droits TV: un gâteau de 7,9 milliard d'euros en 2021-2022

Dans moins de deux ans, LaLiga va ouvrir un nouveau cycle pour les droits de sa compétition. L'UEFA et les ligues nationales savent que les innovations technologiques marqueront la valeur des droits de télévision à moyen terme. Actuellement, un club anglais encaisse plus qu'une équipe espagnole et italienne ensemble, et encore plus que quatre cents équipes réunies des ligues mineures.


L'un des débats actuels du football européen se porte sur les éléments qui faussent la concurrence. Le fait que les droits de télévision soient gérés au niveau national ? La méthode de la redistribution de l'UEFA ? Ou alors, les ayant droits qui détiennent un compte courant illimité ? La réponse se trouve dans le prisme choisi, car au niveau des pays, les deux aspects qui les affectent le plus sont les deux dernières questions. Cependant dans l'ensemble du continent, il ne fait aucun doute que le prix des retransmissions sur le marché fait la différence. Aujourd'hui, plus d'un millier de clubs se battent pour un gâteau de sept milliards neuf cents millions euros par année. Dans cette manne financière, les nouveaux formats des compétitions et les évolutions technologiques constituent des menaces majeures pour la répartition.


La sonnette d'alarme de l'UEFA


Dans son dernier rapport sur la situation de l'industrie du football européen, l'UEFA s'interroge sur l'avenir des compétitions de clubs. La polarisation inquiète la confédération dirigée par Aleksandar Ceferin, qui a alerté sur l'écart de ressources qui sépare les championnats les mieux dotés et ceux qui le sont moins. Pour mieux contextualiser la différence d'échelle, le rapport résume:


« Les revenus télévisuels globaux de quatre cents clubs qui sont en dehors des vingt championnats majeurs sont inférieurs au quart de ceux d'un club moyen de Premier League. »



En 2018, les revenus issus des droits audiovisuels ont connu une croissance de 5% sur tout le continent. Toutefois cette croissance a été à deux vitesses si l'on se penche au cas par cas dans chaque pays. Elle a aussi été le taux de progression le plus faible de ces cinq dernières années. Selon l'UEFA, ce faible taux serait dû du fait que les principales ligues majeures avaient déjà des contrats en cours. Mais aussi, les championnats mineurs ont pu conclure de nouveaux accords qui impliquent une augmentation à deux chiffres de leurs émoluments. C'est le cas de la Belgique et de la Turquie, deux pays qui tentent de talonner le top 5.


L'échappée du football anglais a commencé en 2015 avec la signature d'un contrat record avec Sky et BT Sport. Un contrat, qui au fil du temps, a mis en évidence une avance de quatre années sur le prix de marché réel des droits TV au Royaume-Uni. Cette explosion a permis aux clubs anglais de gagner en moyenne plus que les Allemands et les Espagnols réunis. Mais surtout, autant que l'ensemble de la première division portugaise et deux fois plus que les élites belges et néerlandaises.


D'ailleurs ces deux derniers pays cités ont débuté ces dernières semaines des pourparlers pour une fusion ambitieuse. Si la Belgique et les Pays-Bas arrivent à réunir leurs meilleures équipes dans un même championnat, ils ouvriront de nouveaux marchés et rendront ce produit plus attractif pour les télévisions. Selon leurs estimations, les retombées économiques pourront passer de cent cinquante et un millions d'euros à quatre cents millions d'euros, alors que l'ensemble de leurs revenus TV a augmenté de vingt huit millions d'euros entre 2014 et 2018.


Ce sont des formules spéculatives afin d'accélérer la croissance à un moment incertain sur ce qui se passera de 2021 à 2022, lorsque la plupart des contrats audiovisuels en vigueur prendront fin. En même temps, l'UEFA devrait clarifier l'avenir de ses compétitions. Les plus grands clubs prônent un système qui protège leur présence en Ligue des Champions tandis que les ligues nationales s'y opposent à cause de l'impact que cela pourrait avoir sur la pérennité économique de leurs championnats.


Le plafond de verre atteint ?


Du côté de l'UEFA, les analyses indiquent que la Premier League maintiendra ses revenus stables jusqu'en 2021, tandis que la Serie A recevra entre cent et cent soixante millions d'euros supplémentaires par saison. La Liga Santander pourrait augmenter son chiffre jusqu'à deux cent quarante millions d'euros à partir de la saison 2019/2020. Le gros pactole est du côté de la Ligue 1, qui obtiendra quatre cents millions d'euros de 2020 à 2021 à la suite du contrat faramineux qu'elle a signé avec Mediapro, et dans une moindre mesure avec Bein Media.


Source : UEFA


En revanche, le cas de l'Angleterre est très symptomatique de ce qui pourrait arriver à l'avenir. À moyen terme, les Anglais ont réussi à augmenter leurs revenus par les ventes internationales, ce qui a compensé la baisse de son marché domestique. C'est une tendance que l'UEFA, elle-même, a admise si l'on se réfère au dernier appel d'offre de la Ligue des Champions qui rapporte sept cent cinquante millions d'euros aux clubs. Bien que l'augmentation ait eu lieu en Europe et à l'international, la confédération a affirmé que le pourcentage de croissance à l'étranger est bien plus élevé, à l'instar des principales ligues nationales.


Il est donc évident de constater qu'un plafond a été atteint. Ainsi la Premier League et la Bundesliga ont décidé de diminuer le nombre de matchs retransmis à la télévision afin que davantage d'opérateurs puissent être écartés. En Espagne, LaLiga diffuse tous ces matchs depuis plus de dix ans et envisage d'en supprimer un car elle a également introduit son système de carrousel qui lui permet de se caler aux heures de grande écoute en Amérique du Nord et en Asie.


En outre, l'une des raisons de la croissance de ces dernières années est la tendance de rendre les droits collectifs pour une vente commune. Une formule que pratiquement tous les pays européens appliquent sauf le Portugal. Chez les Lusitaniens, les trois grands clubs (Benfica, Sporting et Porto, NDLR) continuent de rejeter ce modèle pour vendre leur retransmission individuellement. La raison qui explique pourquoi le pays est celui qui a le grand écart de revenus entre le club qui touche le plus d'argent et celui qui touche le moins. La différence est multipliée à plus de dix.


Dans les autres championnats, ce ratio est de 2,3 en moyenne et LaLiga Santander est la plus inégale des cinq grands avec un ratio de 3,1. Malgré tout, l'Espagne a fait de gros efforts en mutualisant les revenus audiovisuels, puisqu'il y a dix ans, le ratio était deux fois supérieur. La différence est de 1,4 en Premier League, 2 en Bundesliga, 2,4 en Ligue 1 et 2,6 en Serie A.


Un marché saturé, mais en danger


Actuellement, personne ne s'attend à ce que les groupes de télécommunications n'aient plus besoin d'utiliser le football pour proposer leur service de téléphonie et de fibre optique. Ils ont financé la croissance du football en l'exploitant de manière spécifique, mais à moyen terme cette démarche n'aura plus de sens.



« Cette offre comporte un danger. Elle est très bonne si on prend en compte les infrastructures des pays et de l'extension de la fibre, des services numériques etc. Mais je me pose une question : le jour où les ménages disposeront d'une fibre opérationnelle, ces opérateurs vont-ils avoir besoin du football et du sport pour stimuler leur offre? Ou alors se diront-ils qu'ils ont atteint le bout et garderont leur véritable activité, à savoir l'exploitation des services liés à internet ? C'est danger pour l'avenir qui doit être prévu. »

Source : Jordi Roures, directeur de Mediapro lors du Sport Business Meeting 2019 de Palco23.


À ce jour, la décision des télécoms et des plateformes comme Sky est de continuer à soumissionner, mais avec des offres plus restreintes. En effet, dans beaucoup de pays, ils ont été contraints de mettre plus d'argent que prévu sur la table en raison de la concurrence naissante des chaînes cherchant une distribution multiplateforme, comme le fait Bein en France ou Mediapro en Espagne. Mais surtout à cause d'un phénomène beaucoup plus récent, les services OTT (over-the-top) comme DAZN.


A quoi doivent s'attendre les grands champions des droits de télévision ?
En millions d'euros, les revenus assurés pour chaque cyle de trois ans avec les derniers contrats signés.
- Cycle Revenus
Premier League 2019-2022 10 658
La Liga 2019-2022 6 146
Ligue 1 2020-2023 5 088
Bundesliga 2018-2021 4 320
Serie A 2018-2021 3 939
Ligue des Champions 2018-2021 2 744
Source : UEFA


L'entreprise britannique a fait son entrée en Espagne, en Allemagne et en Italie et a réévalué les droits sportifs que les géants refusaient de revaloriser. DAZN a une puissance financière nécessaire qui peut lui permettre de fonctionner à perte pendant plusieurs années tout en stimulant la demande et générer un modèle commercial viable. Celui-ci assure une coexistence entre la souscription directe des abonnements et une sous licence des droits sur les télécoms ainsi qu'une publicité mieux segmentée. Un modèle qu'il teste déjà dans tous ces pays précités.


Il y a des interrogations sur le fait que l'OTT sera le relais des plateformes IP et satellite. Mais il ne faut pas occulter la difficulté du système, que beaucoup tentent à tort de comparer avec le modèle Netflix. En vérité, il y a deux différences à ne pas négliger. La première est que Netflix peut produire son propre contenu. La seconde est que les droits sportifs ont toujours une exploitation globale, tandis que les services comme DAZN, Eleven Sport et autres dépendront toujours de tiers pour remplir leur plateforme. Et aussi, les contrats sont à moyen terme.


«La relation avec la télévision ne cesse de surprendre. D'une part, les consommateurs délaissent la télévision payante classique pour ne disposer que du service internet. Ce qui peut servir à la fois la consommation des vidéos à la demande et l'abonnement aux services de streaming comme Netflix dont l'agressivité commerciale rappelle celle que la télévision par câble a fait subir à la télé traditionnelle il y a une vingtaine d'années. En revanche la télévision traditionnelle refuse de mourir, car elle représente un excellent complément au service de vidéos à la demande et c'est un moyen gratuit de maintenir un produit essentiel: les expériences collectives en direct comme le sport.»

Source :  Deloitte, tendance des TMT 2020 (technologie, médias et télécoms).


Maintenant, la question qu'on peut se poser est comment tout cela se traduira dans le football ?


(Crédit image : RMC / BFM TV)

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