Nou Mestalla : Le contrat FCC à 194,6 M€ éclaire une réalité budgétaire plus complexe

Le Nou Mestalla relancé mais toujours incertain : surcoûts, litiges et financement inachevé menacent l'achèvement du projet d'ici 2027.
Relancé in extremis en janvier 2025, le chantier du Nou Mestalla avance sous haute tension. Derrière le contrat à 194,6 M€ signé avec FCC, les incertitudes s'accumulent : inflation, obligations non tenues, litiges réglementaires et budget sous-évalué. Une équation complexe que le Valencia CF avait tenté de stabiliser par un refinancement massif.
Crédit image : El Diario


Le groupe FCC a officialisé dans son rapport d'activité du premier trimestre 2025 un contrat de 194,6 millions d'euros signé avec le Valencia CF pour achever la construction du Nou Mestalla dans un délai de 24 mois. Cette annonce donne enfin une base chiffrée à un projet qui, malgré une reprise des travaux en janvier dernier, reste entouré de zones d'ombre financière et réglementaire.


Le contrat FCC révèle un réalité financière plus lourde


Le contrat signé entre le Valencia CF et FCC prévoit un budget de 194,6 millions d'euros hors taxes pour achever la construction du Nou Mestalla dans un délai de 24 mois, à compter de la reprise effective du chantier le 10 janvier 2025. Ce montant officialisé dans le rapport trimestriel du groupe FCC, n'inclut ni la TVA, ni le bénéfice industriel de l'entreprise, ni d'éventuels travaux annexes. Selon les projections internes initiales du club, un budget de 171 millions d'euros aurait été suffisant pour finaliser l'infrastructure, mais cette estimation est aujourd'hui largement dépassée.


L'audit externe commandité par la mairie de Valence à Vielca Ingenieros a livré une évaluation bien plus élevée. En intégrant les effets de l'inflation (estimée à +17 %), les frais généraux, la marge bénéficiaire de l'entreprise et la TVA, le coût total du projet est désormais estimé à 341,46 millions d'euros TTC. Ce calcul comprend également une valorisation à hauteur de 63 millions d'euros des éléments déjà construits entre 2007 et 2009, période à l'issue de laquelle le chantier avait été suspendu pour faute de financement.


Dans le détail, le rapport d'audit estime le budget d'exécution matériel à 202,7 millions d'euros, auquel s'ajoutent 38,5 millions d'euros de frais généraux et de bénéfice industriel, ainsi que 50,6 millions d'euros de TVA, pour un total de 291,89 millions d'euros. Cependant, en tenant compte d'une révision des coûts liée à la hausse des prix de construction (+34,4 millions), l'évaluation finale grimpe à 341,4 millions d'euros, dépassant de 50 millions d'euros les projections les plus récentes du club.


L'étude pointe également plusieurs angles morts dans la documentation fournie par l'entité blanquinegra : une faible précision des plans d'architecture et d'installation, l'absence de chiffrage pour des éléments structurants comme les 70 000 sièges prévus, ou encore le flou entourant la piste d'athlétisme, annoncée pour une phase ultérieure mais sans enveloppe budgétaire dédiée. Le rapport souligne en outre que le projet soumis correspond à une version préliminaire du projet d'exécution, ce qui rend l'estimation finale sujette à variations.


Enfin, certaines composantes périphériques mais contractuellement obligatoires n'ont pas été budgété à ce stade, à commencer para la réhabilitation de la structure existante, restée exposée aux intempéries pendant plus de quinze ans, ainsi que la construction du centre sportif municipal promis au quartier de Benicalap. Le non-respect de ces engagements annexes pourrait, à terme, fragiliser la légalité de la licence de construction délivrée par la ville.


Le centre sportif de Benicalap, épicentre d'une nouvelle controverse réglementaire


A ce sujet, une nouvelle controverse vient d'émerger. Miguel Zorío, ancien vice-président du Valencia CF, assisté de l'avocat Vicente Martínez Pons, a officiellement demandé au conseil municipal de Valence la suspension immédiate des travaux du Nou Mestalla. Dans une lettre adressée à la maire Maria José Catalá, à l'adjoint au Patrimoine Juan Manuel Badenas, et aux groupes politiques représentés au conseil, le collectif Marea Valencianista dénonce plusieurs infractions aux conditions liées au projet du centre sportif municipal devant être construit à Benicalap, à proximité immédiate du futur stade.


D'après les informations avancées par le média sportif local Super Deporte, les griefs s'appuient sur les dernières observations techniques de la Fundacion Deportiva Municipal (FDM), qui soulignent des manquements documentaires majeurs. Parmi les éléments exigés, mais non fournis :


  • une garantie financière couvrant la totalité des 11,3 millions d'euros de coût estimé du centre sportif,
  • une version actualisée du projet d'exécution, le document transmis datant encore de 2022,
  • et surtout, un rapport archéologique conforme, à la légalisation valencienne sur le patrimoine culturel.


La FDM insiste sur la nécessité d'un suivi archéologique rigoureux des fouilles sur l'ensemble de la parcelle,o conformément à la loi régionale. En effet, des vestiges du XIXe siècle - notamment la cheminée d'une ancienne papeterie - ont été découverts dès les premiers travaux en 2007 et déplacés pièce par pièce sur le périmètre réservé au centre sportif. S'y ajoutent les restes du Molino de la Marquesa, dont la conservation et la mise en valeur figuraient parmi les engagements du club, censément à travers un futur musée au sein du stade.


Zorio, opposant majeur de l'actuel conseil d'administration du club, demande désormais que l'ensemble de la parcelle du Nou Mestalla fasse l'objet d'un nouvel examen archéologique, en raison du temps écoulé depuis les premières excavations et des modifications successive du projet. Pour les plaignants, la poursuite des travaux sans ces documents violerait plusieurs articles des rapports techniques remis à la Ville et pourrait juridiquement invalider la licence de construire conditionnelle obtenue en juillet 2024.


Une sécurisation financière fragile face à une équation budgétaire incertaine


Si la dimension réglementaire du projet soulève encore des incertitudes, notamment autour du centre sportif municipal, le Valencia CF a tenté de sécuriser sa trajectoire sur le plan financier. En novembre 2024, le club a finalisé une importante opération de refinancement majeure, d'un montant de 186 millions d'euros, orchestrés par Goldman Sachs. Cette manœuvre, divisée entre un prêt à long terme (121 millions d'euros) via le marché américain des placements privés (USPP) et un prêt relais à court terme (65 millions d'euros) visait à apurer les dettes historiques du club - notamment envers CaixaBank, Rights & Media et Gedesco - tout en jetant les bases du financement du Nou Mestalla.


Le coût total de finalisation du stade avait alors été estimé à environ 140 millions d'euros, une estimation bien inférieur au montant révélé par FCC et le coût global avancé par l'audit externe de la mairie. Pour couvrir ce montant, le club comptait sur plusieurs sources : 80 millions d'euros du fonds CVC (le prêt participatif du Plan Impulso de LaLiga), 35 millions d'euros issus de la vente de terrain, et la négociation d'un crédit complémentaire de 80 à 100 millions d'euros.


Au 30 juin 2024, le club avait comptabilisé pour 114,01 millions d'euros d'investissements dans le projet Nou Mestalla, selon son rapport financier 2023/2024 consulté par Foot Espagne Business. Le rapport de l'exercice 2024/2025, attendu en fin d'année, permettra de quantifier précisément les nouveaux engagements contractés depuis la relance officielle du chantier en janvier.


Le redémarrage du chantier du Nou Mestalla marque une étape visible dans un feuilleton de plus de quinze ans, mais cette relance reste minée par des incertitudes profondes. Si le contrat signé avec FCC et l'opération de refinancement orchestré par Goldman Sachs traduisent une volonté de reprendre le contrôle, les multiples angles morts du projet - qu'ils soient juridiques, financiers ou patrimoniaux - soulignent les fragilités persistantes du modèle économique porté par le Valencia CF. A moins de deux ans de la date butoir fixée pour l'inauguration, le club évolue sur une ligne de crête : celle d'un projet dont la matérialisation reste suspendue à sa capacité à convaincre ses partenaires, les autorités, et une opinion publique de plus en plus sceptique.

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