FEB Analytics - Real Madrid : la mécanique bien huilée (et coûteuse) des charges d'exploitation à mi-saison 2024/2025

Le Real Madrid fait face à des charges en forte hausse, mais les maîtrise pour soutenir son développement sportif et commercial.
Crédit image : Real Madrid CF

Derrière les chiffres records de revenus révélés par le Real Madrid à mi-parcours de la saison 2024/2025, un autre versant du compte de résultat mérite tout autant l'attention : celui des charges. Car si les recettes témoignent de la puissance commerciale du club, les dépenses, elles, raconte comment cette puissance se construit et s'entretient au quotidien. Approvisionnements, salaires, prestations externes, logistique, frais divers... L'analyse des comptes semestriels met en lumière une réalité simple mais implacable : faire tourner la machine merengue coûte de plus en plus cher.

Mais cette montée en puissance des charges n'est pas synonyme de dérive. Bien au contraire : derrière chaque hausse se cache un levier stratégique — qu'il s'agisse de soutenir l'activité événementielle du nouveau Bernabéu, d'investir dans la formation, ou d'accompagner l'internationalisation croissante de la marque Real Madrid. Plongée dans les coulisses d'une gestion qui conjugue rigueur économique et ambitions XXL.


Approvisionnements : quand la diversification commerciale nourrit la dépense



Derrière cette montée en puissance, un poste se distingue : les "autres consommations", catégorie fourre-tout mais révélatrice. Banquets VIP, expériences immersives, événements hors match… le nouveau Bernabéu, pleinement opérationnel, en est à la fois le terrain de jeu et le moteur. En deux ans, cette ligne a quasiment triplé, passant de 15,79 à 39,58 millions d’euros. Le détail reste nébuleux, mais la tendance est claire : la transformation du stade en hub multifonction engendre de nouvelles dépenses à la hauteur des ambitions du projet.

En revanche, la consommation de matériel sportif reste remarquablement stable — 3,36 millions d’euros, soit même une légère baisse. Malgré un calendrier plus chargé et l’arrivée de nouveaux joueurs, la logistique sportive semble optimisée, preuve d’une gestion calibrée des équipements, tant pour l’équipe première que pour les catégories inférieures.

Autre signal révélateur : 96,6 % des achats sont réalisés en Espagne. Le choix assumé du circuit court permet au Real de gagner en réactivité tout en consolidant ses liens avec l’économie locale. Dans un contexte de forte activité, cette proximité logistique devient un atout..

Enfin, les stocks continuent de croître, en cohérence avec l’explosion des ventes de produits dérivés opérées via Legends. Le club anticipe, stocke, investit. Une mécanique commerciale bien rodée, mais qui a un coût.


Masse salariale : continuité maîtrisée et montée en puissance en coulisse



Dans un univers où les masses salariales explosent à la moindre signature clinquante, le Real Madrid trace son propre sillon. À mi-saison 2024/2025, le club affiche une dépense salariale de 239,4 millions d’euros, en hausse mesurée de 4,8 % par rapport à l’an passé. Un rythme modéré, en phase avec la stratégie de stabilité contractuelle qui prévaut à Valdebebas.

L’équipe première masculine, colonne vertébrale du projet sportif, continue d’absorber la majorité de cette enveloppe : 160,97 millions d’euros. C’est à peine plus qu’un an plus tôt (+2,4 %), malgré les prolongations successives de joueurs comme Lunin ou Vinicius. Même l’arrivée tonitruante de Kylian Mbappé, libre de tout contrat, n’a pas provoqué de dérapage majeur. Le club semble avoir trouvé un équilibre subtil entre compétitivité et maîtrise des coûts.

Mais si la vitrine reste stable, l’arrière-boutique, elle, prend de l’ampleur. Les charges liées aux joueurs non-inscrits à LaLiga grimpent de près de 15 %, à 34,1 millions d’euros. Un mouvement qui illustre l’essor progressif de la section féminine et la structuration renforcée de la Fabrica. Le Real investit dans sa base, consolide ses fondations.

Autre poste en croissance : les effectifs non sportifs. Avec 43 millions d’euros dépensés à mi-parcours, le personnel administratif, commercial et technique incarne la mue d’un club devenu entreprise globale. La croissance est continue (+6,5 % sur un an), portée par l’exploitation du Bernabéu, les partenariats à l’international, et la complexification du modèle économique.

Enfin, la section basketball reste fidèle à sa trajectoire : 17,2 millions d’euros de masse salariale, en hausse de 8,7 %. Le club maintient le cap, entre renforts ciblés — comme Serge Ibaka — et compétitivité constante sur la scène européenne. Un investissement modeste à l’échelle du Real, mais stratégique en termes d’image et de résultats.

Coût global de l'effectif : stabilité comptable et ajustements ciblés



En coulisses, la construction d’un effectif compétitif ne se résume pas aux salaires. Elle passe aussi par les amortissements, les transferts, les dépréciations… autant de lignes comptables qui racontent une autre histoire. À mi-saison 2024/2025, le coût total de l’effectif sportif du Real Madrid s’élève à 252,66 millions d’euros. Un chiffre pratiquement inchangé depuis trois exercices — preuve d’une stratégie sans excès.

Dans le détail, les salaires liés aux joueurs et au staff représentent 195,1 millions d’euros, en légère hausse de 4,4 % sur un an. Mais ce sont surtout les sections dites de développement — réserve, académie, équipe féminine — qui tirent la progression, alors que l’équipe première reste contenue. Le club semble désormais miser autant sur l’avenir que sur le présent.

Les amortissements des droits fédératifs, eux, s’établissent à 57,38 millions d’euros. Ce poste suit une pente descendante à moyen terme (-16 % sur deux ans), en lien avec une politique de transferts recentrée : moins de volume, plus de ciblage. L’exemple le plus parlant ? Kylian Mbappé. Arrivé libre, il n’alourdit pas les amortissements. À l’inverse, le transfert d’Endrick commence à se refléter dans les comptes.

Autre signal positif : la quasi-disparition des pertes sur cession ou des dépréciations d’actifs joueurs. Passées de 5,8 millions à 0,18 million d’euros en un an, ces charges deviennent anecdotiques. Là encore, le message est clair : le Real Madrid valorise mieux ses actifs et réduit les erreurs coûteuses du passé.

En parallèle, l'amortissement des droits fédératifs s'établissent à 57,38 millions d'euros, en hausse modérée par rapport à 2023/2024 (+3,3 %), mais en nette baisse comparé à 2022/2023 (-16 %). Cela reflète la politique de transfert mesurée observée au Real Madrid ces dernières années, avec une attention portée à la valeur comptable des effectifs.

Le marché estival 2024, dominé par les arrivées d’Endrick et de Mbappé, aura donc eu un impact limité sur la structure financière. Les effets sont visibles, mais maîtrisés — fidèle à cette logique d’équilibre qui imprègne désormais la gestion du club.


Autres charges d'exploitation : montée en puissance et angles morts


Derrière l’explosion des revenus et la maîtrise des salaires, une autre ligne du compte de résultat attire l’attention à mi-saison : celle des autres charges d’exploitation. En hausse de plus de 34 %, elles traduisent à la fois l’expansion du modèle économique du Real Madrid… et certaines zones d’ombre encore peu documentées.

Premier moteur de cette hausse : les services extérieurs, qui bondissent à 122,5 millions d’euros (+31 % sur un an). Entretien du nouveau Bernabéu, logistique des événements, externalisation de certaines missions… tout indique que le club renforce sa capacité opérationnelle pour accompagner la diversification de ses activités. L’entretien des infrastructures pèse à lui seul 9,3 millions d’euros, tandis que les prestations sous-traitées et les services professionnels atteignent respectivement 14,7 et 4,5 millions d’euros. Un signe clair : le Real Madrid ne se contente plus de gérer un club de football, il administre une plateforme événementielle et commerciale à grande échelle.


Mais c’est du côté des charges dites “diverses” que l’envolée est la plus spectaculaire. Regroupées au sein des “autres charges de gestion courante”, elles atteignent 84,67 millions d’euros, soit une hausse de 71,1 % sur un an. À elles seules, les dépenses “diverses” approchent les 71,4 millions d’euros. Le rapport du club reste vague, évoquant simplement la commercialisation des droits audiovisuels et les contributions de solidarité au sport amateur. Ce flou alimente les interrogations sur la nature exacte des engagements contractuels pris par le club, possiblement liés à des partenariats, des licences ou des projets non récurrents.

Le reste des postes annexes évolue plus discrètement. Les charges fiscales rebondissent à 3,7 millions d’euros après un creux ponctuel, tandis que les frais liés aux transferts, eux, se font presque invisibles à ce stade de la saison (0,2 million d’euros seulement, contre 4,5 millions d’euros un an plus tôt).

Enfin, les provisions et pertes commerciales inversent leur tendance habituelle : traditionnellement favorables au club via des reprises, elles génèrent cette fois une charge nette de 3,4 millions d’euros. Cela peut traduire une plus grande prudence dans un environnement économique européen marqué par des tensions de trésorerie et des délais de paiement rallongés.

En somme, si ces charges pèsent davantage dans les comptes, elles accompagnent surtout la transformation profonde du Real Madrid en une organisation plurielle, où le sportif ne représente plus l’unique centre de gravité.


Une pression budgétaire croissante, mais encore sous contrôle


Si le Real Madrid affiche des revenus records à mi-saison 2024/2025, l’envers du décor révèle une autre réalité : celle d’un modèle économique en tension croissante, où chaque euro gagné s’accompagne de dépenses de plus en plus élevées. Les chiffres sont clairs : 493 millions d’euros de charges d’exploitation ont été enregistrés au 31 décembre, contre 396,6 millions un an plus tôt. Soit une hausse de 24,3 % en l’espace de douze mois.


Dans le détail, les approvisionnements ont bondi à 42,9 millions d’euros (+45 %), reflet direct de l’intensification des activités hors terrain. La masse salariale, pilier central du modèle sportif, poursuit sa progression mesurée à 239,4 millions d’euros (+4,8 %), portée notamment par les extensions de contrat et le développement des sections annexes. Enfin, les autres charges d’exploitation, poste désormais incontournable dans la stratégie multi-activité du club, atteignent 210,6 millions d’euros (+34 %), révélant une organisation toujours plus complexe, professionnalisée et orientée événementiel.

Mais malgré cette pression grandissante, l’équation financière reste, pour l’heure, équilibrée. La croissance des dépenses s’inscrit dans une logique d’expansion maîtrisée, adossée à des recettes en forte hausse et à une gestion prudente du capital humain et des actifs sportifs.

Reste à voir si cet équilibre fragile résistera aux exigences du second semestre — sur le terrain comme dans les comptes.


Vous avez apprécié cet article ? Plongez dans la suite de notre série consacrée aux comptes semestriels 2024/2025 du Real Madrid avec notre analyse de la rentabilité, dernière étape du volet "Compte de résultat".


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