CD Leganés : Entre un investissement boursier raté et l'austérité

Le club Pepinero est l'une des entités avec la plus petite structure et l'approche économique la plus conservatrice en Liga. Il a entamé sa quatrième saison consécutive dans l'élite, mais est confronté à une situation sportive délicate qui pourrait mettre en danger ses investissements en bourse et affaiblir sa rentabilité

Le CD Leganés a accédé à LaLiga Santander pour la première fois de son histoire en 2016/2017 avec une situation économique saine. Le club avait entièrement épongé ses dettes, mais aussi s'est toujours refusé un plan d'internationalisation ou d'expansion de sa marque qui aurait pu lui offrir plus de revenus. En outre, l'une de ses plus grandes barrières est sa proximité avec Madrid. Sa masse sociale est limitée puisque deux des plus importants clubs espagnols se trouvent dans le même secteur géographique.

Apercu général

Malgré la concurrence féroce avec ces marques historiques du football hispanique, le CD Leganés a réussi à ajouter de nouveaux aficionados, jusqu'à un record historique (10 300 abonnés en 2019, NDLR). Cette étape franchie a déjà forcé une augmentation de la capacité du stade municipal de Butarque, qui est passé de 10 951 à 12 450 sièges entre 2016 et 2018. Durant cette période d'agrandissement, de nouveaux espaces d'accueil répondant aux besoins des sponsors et des entreprises locales ont été installés. Rien qu'en 2017, un montant de 3,2 millions d'euros a été investi pour achever les travaux de rénovation et répondre ainsi aux exigences de LaLiga. La mairie de Leganés y a contribué à hauteur de 80%.

La présidente du CD Leganés Victoria Pavón et le maire de la ville entre 2011 et 2015, Jesús Gómez, en 2014, lors d'une réunion pour les besoins du club qui venait de monter en Segunda (crédit photo : Al Dia Leganés)

Cette collaboration entre le club et la ville est constante depuis que l'équipe a mis le pied dans l'élite. Depuis, la municipalité a n'a cessé d'apporter son soutien pour conforter la place de son équipe dans le football professionnel. Elle a investi plus de 14 millions d'euros en ce sens. En retour, le club de Leganés a souhaité renforcer son image au sein de la commune, comme en témoigne sa décision d'allouer 4,2 millions d'euros pour la construction d'un centre omnisports destiné à l'ensemble de la population en 2019.

Pour assumer les coûts de ces travaux, le club n'était pas obligé de se rendre auprès des banques, car en juin 2018, il avait 23,97 millions d'euros investis en bourse dont la quasi-totalité correspond aux titres Banco Santander, selon le vice-président et actionnaire principal Felipe Moreno et son épouse Victoria Pavón. 

L'activité boursière 2018/2019 et perspectives 2019/2020

Le CD Leganés fait partie de ces équipes espagnoles qui intéressent les investisseurs. Sans dette et avec trois saisons consécutives en Liga Santander. Cependant, les offres économiques n'ont jamais dépassé les 70 millions demandés par le couple Moreno-Pavon, qui dirige l'entité depuis 2009. Sur la balance économique du football espagnol, le club est en concurrence avec le SD Eibar en terme d'indice de rentabilité. Leganés a gagné 20,72 millions en 2018/2019, soit une croissance de 31,4% par rapport à l'exercice précédent. Toutefois, les résultats sportifs de la saison en cours accélèrent sa dégringolade en bourse.

Après les investissements de juin 2018, la direction a décidé de réinvestir les surplus obtenus en actions Banco Santander, entre autres titres, mais la performance sportive actuelle n'est pas positive. Alors que LaLiga est actuellement suspendu à cause de la pandémie du coronavirus, Leganés est 19e du championnat et risque la relégation en fin de saison. Les 23,96 millions investis initialement ont d'abord subi une correction en 2017/2018 qui a porté la valeur à 20,39 millions. Ensuite, la saison dernière, la valeur comptable de cet investissement a dû être ajustée à nouveau avec une perte de 2,12 millions d'euros. Ce qui porte finalement ce paquet à 18,26 millions.

Actuellement, les pertes cumulées s'élèvent à 5,7 millions d'euros, bien que Leganés ait pu récupérer une partie de cet argent grâce aux dividendes que la banque présidée par Ana Botín a distribués. En 2017/2018, un produit financier de 531 000 euros a été enregistré, auquel s'ajoute 912 000 euros en 2018/2019.

Tandis que certains clubs optent pour des dépôts à taux fixe, d'autres ont décidé d'être plus actifs sur le marché des transferts compte tenu de la faible rentabilité que les banques offrent aujourd'hui. C'est un domaine dans lequel le CD Leganés a mieux réussi jusqu'à présent.

L'activité économique 2018/2019 : Revenu d'exploitation

En 2018/2019, le club pepinero a pu profiter de sa troisième saison d'affilée en Liga Santander pour atteindre un coefficient sportif élevé. De ce fait, il a pu bénéficier de 47,71 millions d'euros de revenus audiovisuels, soit 10,5% de plus que la saison précédente. Cette manne financière a représenté 86,5% de son chiffre d'affaires qui s'est élevé à 55,12 millions d'euros, une progression de 4,7% sur une année.

Les droits de télévision ont compensé aussi la stagnation de l'apport des abonnements et de la billetterie, ainsi que la baisse des revenus commerciaux et marketing qui ont respectivement chuté de 27,22% et de 32,01% par rapport à 2017/2018. Cette baisse du secteur commercial est principalement due à la diminution des revenus du sponsoring qui sont passés 3,42 millions à 2,17 millions d'euros sur une année.

Tout compte fait, le CD Leganés a connu une légère baisse de 0,78% de son revenu d'exploitation. Les prévisions pour cette saison ne sont guère réconfortantes puisque le chiffre d'affaires devra connaître une baisse de 2,58% tandis que les autres revenus d'exploitation chuteront aussi 3,15%. Avec la situation du coronavirus et la relégation qui pointe son nez, l'impact sera probablement plus important.

Le ratio d'efficacité

Malgré la lente progression du chiffre d'affaires,  le club a sensiblement augmenté sa masse salariale qui a enregistré une hausse 31,13%. Cette augmentation s'est plus accentué au niveau des catégories inférieures. Les charges salariales de cette catégorie ont été multipliées par six tandis que l'équipe première passait de 22,5 millions à 27,18 millions d'euros.

En dépit de cela, le CD Leganés reste dans les recommandations de l'UEFA en maintenant son ratio d'efficacité en dessous de la limite recommandée de 70%. Autrement dit, le poids de la masse salariale représente 54,22% de l'activité économique du club. Ce taux a augmenté d'environ de quatorze points par rapport à la saison 2017/2018 et pratiquement doublé en deux ans. 

Pour la saison en cours, la direction prévoit une détérioration cet indice qui pour la première fois depuis la montée en Liga Santander, dépassera le seuil recommandé de trois points. Selon les prévisions budgétaires, la masse salariale du personnel sportif connaîtra une augmentation de 32,50% pour atteindre 39,92 millions d'euros. 

Toutefois, avec les ventes de Youssef En-Nesyri au Sevilla FC et de Martin Braithwaite au FC Barcelone, Leganés s'est libéré de ses deux meilleurs joueurs de la saison. Ce qui probablement baissera le montant prévu en début de saison.

Le résultat d'exploitation avant amortissement

Leganés a la particularité d'être un club austère qui a toujours su minimiser ses dépenses. Malgré l'augmentation de sa masse salariale évoquée ci-dessus, la direction a toujours pris le soin de ne pas approcher le plafond fixé par LaLiga. Lors de la saison 2018/2019, la limite de dépense salariale autorisée par le patronat du football espagnol était de 52,90 millions d'euros.

Avec cette gestion rigoureuse de ses charges d'exploitation, le Lega, contrairement à d'autres clubs, maintient depuis sa montée un EBITDA positif. C'est-à-dire, le club ne compte toujours pas sur les plus-values des transferts pour éviter que son résultat d'exploitation ne rentre dans le rouge.

Chose qui arrivera certainement cette saison, si l'on se réfère toujours des prévisions budgétaires. Pour la première fois depuis 2016/2017, l'EBITDA du club sera négatif. Il passera de 9,83 millions d'euros à -310 000 euros. Cependant, il faudra tenir compte des ventes de joueurs lors du mercato d'hiver pour inverser la tendance.

Dans ce domaine, avec les ventes Diego Rico à Bournemouth et de Gabriel Pires au Benfica, le Lega a pu réaliser une plus-value à hauteur de 23,60 millions, soit une augmentation plus de 17 millions d'euros par rapport à 2017/2018. Le montant escompté cette saison est de 10 millions d'euros, mais avec les ventes de Braithwaite et d'En-Nesyri qui ont rapporté 38 millions d'euros, le résultat sera certainement plus que prévu.

Conclusion

Malgré, la menace de la descente en Liga Smartbank et l'investissement en bourse, qui pour le moment, est un fiasco, Leganés reste l'une des structures les plus étroites de LaLiga Santander. En dehors du personnel sportif, seulement treize salariés travaillent au club. la charge salariale de ces employés effleure à peine le demi-million d'euros sans compter les rémunérations de la présidente Victoria Pavón et de son mari. Avec 8,32 millions en trésorerie, le club a réalisé un bénéfice net de 20,72 millions d'euros, malgré un résultat financier négatif.

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Crédit photo couverture : El Pais