La Liga F : Un modèle de croissance fragile mais ambitieux pour le futfem

Beatriz Alvarez, présidente de la Liga F.
Crédit image : Relevo

Depuis son entrée dans l'ère du professionnalisme en 2022/2023, la Liga F, la première division du football féminin en Espagne, traverse une période cruciale pour asseoir sa viabilité économique et consolider sa place dans le paysage sportif espagnol et international. Si les progrès réalisés sont significatifs, les défis restent nombreux, notamment avec la fin imminente des subventions gouvernementales du Conseil Supérieur des Sports (CSD).


Un équilibre économique fragile mais en amélioration


La saison 2023/2024 a vu la Liga F enregistrer un bénéfice net modeste de 30 347 euros, un effondrement de 91 % par rapport à l'exercice précédent, où le bénéfice s'élevait à 366 000 euros. Pourtant, les revenus totaux ont progressé de 27 %, atteignant 22,8 millions d'euros, portés par les droits télévisés, les partenariats commerciaux, et les subventions du CSD.


Les droits audiovisuels ont généré 7,5 millions d'euros, un bond de 22 % par rapport à la saison précédente. Parmi ces revenus, 2,4 millions d'euros proviennent des ventes internationales, en hausse de 57 %. Ces chiffres démontrent une augmentation de l'intérêt pour la Liga F au-delà des frontières espagnoles, renforcée par des accords stratégiques avec des diffuseurs comme DAZN et Mediapro, garantis jusqu'en 2027.


Côté commercial, malgré une augmentation des revenus de 33 % (8 millions d'euros), la Liga F a souffert du retrait de Finetwork, son sponsor principal. Ce désengagement a fait plongé les revenus issus des sponsors à seulement 1,9 million d'euros, une baisse de 58 %. Cependant, l'accord de commercialisation avec LaLiga, piloté par Javier Tebas, a permis de compenser en grande partie cette perte, générant 6,1 millions d'euros en 2023/2024.


La fin des subventions publiques : une épreuve à surmonter


Le véritable défi pour la Liga F réside dans l'arrêt des subventions du CSD après la saison 2024/2025. Ces aides, qui représentent 7 millions d'euros par an, ont été essentielles pour accélérer la professionnalisation des clubs et soutenir les infrastructures. Beatriz Alvarez, présidente de la Liga F, se veut rassurante.


"Quand nous avons commencé en 2022/2023, nous savions que la subvention du CSD était prévue pour trois ans afin de créer une base solide, mais qu'à partir de là, il fallait consolider une structure durable. Cela garantissait la viabilité de la compétition grâce aux revenus que nous avons et à des revenus supplémentaires pour la saison prochaine", a-t-elle déclaré lors d'une rencotre avec les médias mercredi dernier.


Selon elle, la compétition est désormais en mesure de compenser cette perte grâce à des revenus alternatifs. Parmi eux, on note :


  • L'intégration des matchs de la Liga F dans les paris sportifs (quinielas), actuellement en négociation.
  • Un accord avec la Fédération Espagnole de Football (RFEF), signé en juillet 2024, qui prévoit une contribution spécifique pour promouvoir la compétition.
  • Une croissance continue des droits télévisés et des revenus commerciaux, ces derniers estimés à 10 millions d'euros pour la saison en cours. Dans le domaine commercial, LaLiga continuera son soutien jusqu'en 2026/2027.



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Des dépenses en hausse : un frein à la rentabilité


Si les revenus augmentent, les dépenses explosent également, limitant la capacité de la Liga F à dégager des bénéfices conséquents. En 2023/2024, les coûts totaux se sont élevés à 22,7 millions d'euros, en hausse de 34 %. Parmi les postes les plus significatifs :


  • Les approvisionnements (10,47 millions d'euros), principalement liés à la production audiovisuelles et aux droits versés aux clubs.
  • Les dépenses de personnel (1,94 millions d'euros), augmentées de 49 % pour gérer une équipe de 30 employés.
  • Les aides monétaires aux clubs (5,24 millions d'euros), doublées par rapport à la saison précédente. Cela inclut 2,5 millions d'euros pour le financement des infrastructures et 2,5 millions pour les frais d'arbitrage.


Un avenir prometteur mais incertain


La Liga F a encore beaucoup à prouver pour s'imposer comme une référence durable dans le football féminin. Parmi les initiatives en cours, plusieurs projets méritent d'être soulignés :


  1. Le renforcement de la marque commerciale de la compétition : Actuellement, la Liga F reste la seule grande ligue européenne sans sponsor pour le naming après le départ de Finetwork. La recherche d'un partenaire stratégique pourrait offrir un coup de pouce financier significatif.
  2. L'amélioration des conditions des joueuses : En octobre 2024, la signature d'une nouvelle convention collective a marqué un tournant. Le texte apporte des avancées sur des sujets comme la maternité, la santé mentale, ou encore les études et l'entrepreneuriat des joueuses.
  3. La consolidation des partenariats internationaux : La montée des revenus audiovisuels à l'étranger et l'intérêt croissant pour le football féminin offrent des opportunités de diversification.


Malgré ces progrès, des obstacles persistent. Le retrait de sponsors majeurs, la difficulté à équilibrer les comptes face à des dépenses croissantes, et la concurrence avec d'autres ligues européennes pourraient freiner l'expansion de la liga F. De plus, l'affaires Rubiales et d'autres scandales touchant le football espagnol mettent en lumière la nécessité d'améliorer la gouvernance et de renforcer la lute contre les abus.


Depuis sa professionnalisation, la Liga fait des avancées significatives. Avec des revenus en forte progression et des initiatives structurantes, elle montre qu'il est possible de bâtir un modèle durable pour le football féminin. Toutefois, les bénéfices fragiles de la saison 2023/2024 et la fin proche des subventions publiques rappellent que cette réussite reste précaire. Pour assurer son avenir, la compétition féminine devra redoubler d'effort pour attirer des sponsors, optimiser ses dépenses, et consolider son image à l'international.


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